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CFP: “Sexualité et handicap: une approche par les sciences sociales”, Genre, sexualité & société, n°19,​ ​ printemps 2018.

Ha Dang

Appel à contribution
Revue Genre, sexualité & sociétés, n° 19 – printemps 2018: «Sexualité et handicap : une approche par les sciences sociales». Sous la direction de Pierre Brasseur et Lucie Nayak

Envisagés comme des faits de nature relevant de la biologie et de la médecine bien davantage que comme des faits sociaux, handicap et sexualité se sont longtemps dérobés à l’investigation par les sciences sociales. Pourtant, depuis quelques décennies, la sexualité tend à s’imposer comme un objet de recherche légitime en sociologie. De même, les études sur le handicap moteur, sensoriel, mental ou psychique sont en plein essor –notamment dans les pays anglo-saxons – à la suite de l’émergence et du développement des disability studies à partir des années 1980. Reprenant  l’idée foucaldienne de la médecine comme instrument de contrôle social (Foucault, 1976), mais aussi les travaux pionniers du sociologue et activiste Irving Zola sur la médicalisation (Zola, 1983), ce courant interdisciplinaire se donne pour objectif de dépasser le modèle médical du handicap, qui l’appréhende comme un problème individuel, en l’analysant au contraire comme un fait social (Finkelstein, 2005 ; Albrecht, Ravaud et Stiker 2001 ; Boucher, 2003).
Handicap et sexualité sont des «frontières d’humanité», à partir desquelles la société opère des processus d’inclusion ou d’exclusion, d’humanisation, de déshumanisation et de réhumanisation de certains individus et de certains groupes (Rémy et Winance, 2010). À ce titre, ces objets intéressent désormais les chercheur-e-s en sciences sociales, pour lesquel-le-s les «personnes en situation de handicap» sont celles qui ont été socialement désignées comme telles, par rapport à des normes qui varient selon les époques et les aires géographiques (Stiker, 1982).
Pourtant, à l’exception de travaux pionniers sur la sexualité des personnes désignées comme «handicapées mentales» (Giami, Humbert et Laval, 1983 ; Barillet-Lepley, 2001), les recherches appréhendant les handicaps en lien avec la question de la sexualité demeurent peu développées par les sciences sociales françaises, alors même que les personnes socialement considérées comme étant en situation de handicap se sont progressivement constituées en groupes militants et politiques (Brasseur, 2016b). Le thème «Handicap et sexualité » a suscité l’intérêt des chercheurs français autour de thématiques telles que la stérilisation, le VIH/sida et la parentalité dans les années 1990 et 2000 (Diederich, 1998 ; Diederich et Greacen, 2013 ; Gruson, 2012), puis l’assistance sexuelle dans les années 2010 (Nayak, 2013 ; Brasseur et Detuncq, 2014). Cependant, le développement de ces recherches reste plutôt timide, et demeure sans commune mesure avec la production intellectuelle des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne (McRuer et Mollow, 2012).
Aussi proposons-nous, dans ce dossier, de revenir sur les analyses développées par les sciences sociales sur un sujet longtemps considéré comme le pré carré d’autres disciplines afin de mieux faire connaître à un public francophone les débats déjà entamés par les chercheurs anglo-américains.

Axes

Les propositions d’articles devront mobiliser des matériaux empiriques ou théoriques inédits et pourront se situer dans un des deux axes suivants :

1) Représentations & pratiques
Les contributions pourront analyser les représentations de personnes désignées comme «handicapées» physiques, mentales ou sensorielles au sujet de la sexualité, mais également les représentations de la sexualité des personnes «handicapées» telles qu’elles se donnent à voir dans les médias, les arts, les associations militantes, de la part des professionnel-le-s de la santé et du handicap, etc. Les réflexions sur des représentations de la sexualité des personnes dites «handicapées» selon le genre, en lien avec la construction de la masculinité (Dufour, 2013 ; Shakespeare, Gillespie-Sells et Davies, 1996 ; Shuttleworth et Mona, 2002) ou portant sur les difficultés à correspondre aux modèles de féminité (Fine et Asch, 1981) pourront aussi être abordés.
On ne sait pas grand-chose sur les pratiques sexuelles des personnes en situation de handicap. En effet, la dernière enquête sur la sexualité en France (Contexte de la sexualité en France) ne permet pas d’identifier si le répondant est en situation de handicap (Bozon, Bajos, 2008). Les seuls chiffres dont on dispose sont issus de l’exploitation secondaire de données qui n’étaient pas destinées à interroger la sexualité (Giami et De Colomby, 2008). Si l’idée selon laquelle il existerait des pratiques sexuelles spécifiques aux personnes «handicapées» est parfois dénoncée (Nayak, 2014), le concept d’une «sexualité handie», articulée autour de pratiques alternatives (Shakespeare, Gillespie-Sells et Davies, 1996) perdure. Ainsi, peut-on prétendre qu’au même titre qu’il existe une culture gay ou lesbienne, il y aurait une culture sexuelle commune aux personnes « en situation de handicap » ou à certaines catégories de personnes considérées comme «handicapées» ? À ce titre, peut-on considérer les personnes «handicapées » comme une minorité sexuelle (Siebers, 2008) ? On peut également s’interroger sur la place de l’institution (hôpital, foyer de vie, etc.) comme un frein ou un support à la sexualité (Brasseur, 2016a ; Berthou, 2012).
De même, des articles appréhendant une sexualité partagée avec une personne en situation de handicap, sous l’angle des paraphilies (Kafer, 2012), de la pornographie mettant en scène des personnes handicapées (Giami, 2003), ou encore sur l’usage des sites de rencontre (Löfgren-Martenson, 2008 ; Blyth, 2010), mais aussi plus globalement sur l’accessibilité aux lieux de rencontre ou à propos des techniques de réhabilitation sexuelle (prothèses, sex-toys adaptés) trouvent également leur place dans ce dossier thématique. Les textes attendus pourraient mener une réflexion sur l’éducation des personnes «en situation de handicap» à la sexualité (Löfgren-Martenson, 2012 ; White, 2003) ou encore sur l’accompagnement à la santé sexuelle (VIH et IST, pratiques et accessibilité des professionnels de santé, etc.), mais aussi sur les pratiques de care des professionnel-le-s du handicap ou la question des violences sexuelles (Waxman, 1991 ; Diederich, 2006). Enfin, on pourra accorder une attention particulière aux nouveaux groupes
professionnels qui se développent autour de la sexualité des personnes handicapées : travailleur-e-s du sexe (assistant-es-s sexuel-le-s, prostitution spécialisée, massage tantrique, etc.), expert-e-s et formateurs-trices, etc.

2) Politiques et militantismes
Les propositions d’articles pourront porter sur les politiques publiques du handicap et de la sexualité, à l’ère des concepts de «santé sexuelle» (OMS, 2006) et d’ «accessibilité». Le statut social des personnes en situation de handicap a été défini comme étant caractérisé par la «liminalité » (Calvez, 1994 ; Murphy et Alexandre, 1990) : si l’on ne peut plus, aujourd’hui, défendre leur exclusion du corps social, on ne parvient cependant pas à les y inclure pleinement, a fortiori en matière de sexualité. Aussi sont-elles confinées dans un statut d’entre-deux permanent. Les textes pourront ainsi s’intéresser aux possibles voies de sortie de la liminalité dans le domaine de la sexualité : militantisme visant à changer les représentations des personnes en situation de handicap, constitution d’un problème public «handicap et sexualité», etc. Des articles portant sur les politiques sexuelles du handicap (notamment les politiques de stérilisation, d’accompagnement à la parentalité, de prise en charge VIH, etc.) seront également les bienvenus.
Ce numéro pourra aussi constituer l’occasion d’une réflexion, déjà amorcée, sur la place du handicap au sein des mouvements féministes (Garland-Thomson, 2002 ; Masson, 2013) et LGBTQI+: alors que le débat sur l’assistance sexuelle réactive les controverses autour de la prostitution, de nombreux écrits ont insisté sur le mauvais accueil réservé aux questions liées au handicap au sein des mouvements féministes : le manque d’accessibilité aux réunions politiques et militantes a par exemple été déploré. Les articles pourront aborder le traitement de la sexualité à l’intersection des mouvements féministes et des mouvements de défense des droits des personnes « handicapées » (Garland-Thomson, 2002 ; Morris, 1996). Des réflexions sur le « validisme » des féministes occidentales (Ghai, 2003) ont aussi été mené, mais restent peu connues en France, tout comme les recherches sur la place du «handicap» dans les espaces et mouvements LGBTQI+ (O’Toole et Bregante, 1992 ; Clare, 2001).
Plus généralement, ce numéro pourra être l’occasion d’une réflexion sur l’appréhension du handicap au travers de la Crip Theory (McRuer, 2006), et tenter de répondre aux questions suivantes : peut-on penser les personnes en situation de handicap avec les mêmes outils que la queer theory? Quelle place accorder aux personnes handicapées aux seins des espaces LGBTQI+? Quelles alliances? Quelle accessibilité aux lieux politiques et militants? Peut-on alors envisager le handicap dans une perspective intersectionelle (certains appelant de leurs vœux que le handicap devienne une identité mobilisable dans l’analyse des rapports sociaux, tels que peuvent l’être le genre, la race, ou l’âge).
Enfin, une réflexion sur les notions de santé sexuelle, de besoin à la sexualité et de droit à la sexualité appliqués au handicap peut avoir toute leur place dans ce dossier.

Ces pistes sont indicatives. Des travaux empiriques (qualitatifs ou quantitatifs) ou théoriques inédits issus des sciences humaines, sans limite de temps ou d’espace, peuvent être soumis.

Soumettre une proposition

Les propositions d’articles, d’environ 5000 signes espaces et notes comprises, comprennent un titre, une présentation de l’article, les objets et les méthodes, ainsi que les nom, prénom, statut, rattachement institutionnel et email de l’autrice ou auteur. Elles doivent être envoyées pour le 30 janvier 2017 à Pierre Brasseur (brasseurph@gmail.com), Lucie Nayak (lucienayak@yahoo.fr) ainsi qu’au comité de rédaction de la revue Genre, sexualité & société (gss@revues.org). Les auteurs et autrices seront avisé-e-s par mail des propositions retenues début février 2017.
Les articles, inédits, devront être envoyés le 15 juin 2017 au plus tard. Les instructions typographiques pour la rédaction des articles sont disponibles en ligne (https://gss.revues.org/747). Suivant la politique éditoriale de la revue, chaque article fera l’objet d’une double évaluation anonyme. L’acceptation de la proposition ne signifie donc pas acceptation automatique de l’article. Les articles retenus seront publiés dans le numéro 19 à paraître au printemps 2018.

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Numéros parus : http://gss.revues.org/55
Genre, sexualité & société reçoit également des articles «Varia», des propositions de dossiers thématiques ainsi que des comptes rendus. Pour les articles Varia et les propositions de dossiers thématiques, merci de consulter la page instructions aux auteur-e-s: http://gss.revues.org/747
Pour les comptes rendus, merci de contacter les responsables de la rubrique Analyses & comptes rendus à l’adresse email suivante: gss.livres@gmail.com

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